Podcast | Descartes Insights
Épisode 2 : Dernier kilomètre
- Pourquoi parle-t-on de plus en plus du dernier kilomètre ?
- Comment obtenir un avantage stratégique grâce à la livraison ?
- Comment briser les silos pour atteindre une livraison rentable ?
Transcription de l'épisode :
[Laurène De Vialar] Bonjour Mounir Zaïdi,
[Mounir Zaïdi] Bonjour Laurène
[LDV] Alors vous êtes gestionnaire de comptes pour Descartes et votre mission consiste notamment à aider les entreprises à obtenir un avantage stratégique grâce à la livraison du dernier kilomètre. Justement, première question sur le sujet : pourquoi parle-t-on de plus en plus aujourd'hui de ce fameux dernier kilomètre ?
[MZ] Alors tout d’abord je souhaite vous confirmer que c'est un constat que nous faisons également au sein de Descartes. Le dernier kilomètre prend de plus en plus de place aujourd'hui dans les débats liés au transport.
La première raison évidemment c'est que ce petit tronçon, ce petit segment qui finalement et le plus court de la chaîne de transport, il est néanmoins le plus coûteux et le plus impactant d'un point de vue un point de carbone. Et on voit aujourd'hui qu'avec l'inflation, les marges sont de plus en plus réduites. Mais aussi et surtout parce que c'est le dernier kilomètre qui va dicter finalement la qualité ou non de l'expérience de livraison pour le client final.
Alors quand on prend un petit peu de hauteur, finalement on se rend compte que tous les changements qu'on voit aujourd'hui sur l'industrie de la distribution, vont venir impacter la complexité de ces opérations. Et là, il peut s'agir soit d'une menace pour une entreprise, soit finalement d'une opportunité de pouvoir se différencier sur son marché.
« Il peut s'agir soit d'une menace pour une entreprise, soit finalement d'une opportunité de pouvoir se différencier sur son marché. »
[LDV] Mais justement, vous parlez de différenciation sur le marché. Comment est-ce qu'on fait le lien entre 'dernier kilomètre' et 'capacité à se démarquer dans un environnement de plus en plus concurrentiel' ?
[MZ] Alors, le lien de causalité est plutôt simple et direct. Le dernier kilomètre constitue dans tous les cas la dernière interaction ou le dernier contact qu'une entreprise va avoir avec son client. Et donc, c'est d'autant plus important justement d'un point de vue retour d'expérience.
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On se rend compte aujourd'hui que la livraison est un service à part entière. Je vous donne un petit exemple. Si vous souhaitez faire l’acquisition d’un lavage ou d’un lave-vaisselle, que ce soit en magasin ou en ligne, vous allez finalement retrouver les mêmes marques, les mêmes modèles et le plus souvent au même prix.
Ce qui va faire la différence ce sont les services associés : les garanties, les SAV et la livraison.
Donc la capacité pour vous de pouvoir choisir une livraison qui va être gratuite ou peut-être de choisir le jour de livraison, le créneau de livraison, une livraison verte, ou un service d’installation par exemple, ce sont tout un tas d’aspects qui vont venir finalement vous aider à prendre cette décision et vous dire finalement « Je vais dans telle enseigne ou dans telle enseigne. »
[LDV] Alors justement aujourd’hui quand on est un acteur du dernier kilomètre, on doit répondre à beaucoup d’enjeux : des enjeux vis-à-vis du client, vis-à-vis du marché. Est-ce que vous avez des exemples concrets à nous partager sur ces défis que doivent relever les acteurs du dernier kilomètre ?
[MZ] Alors les enjeux sont en nombre de trois. Ils ne varient pas, ce qui va varier finalement ça va être la complexité de ceci.
Le premier c’est tout simple, c’est la capacité de pouvoir répondre aux attentes et de satisfaire son client.
[LDV] Ce n’est pas si simple ça.
Et c’est de plus en plus compliqué. On va aujourd’hui avoir des clients qui sont de plus en plus volatiles, de plus en plus exigeants. Je peux vouloir une livraison aujourd’hui sur mon lieu de travail, demain à domicile. Je peux avoir envie de choisir mon créneau de livraison qui soit peut-être très réduit - deux heures plutôt qu’une demi-journée - ou d’être livré le jour même ou le lendemain.
Tout ça pour dire que finalement ça devient de plus en plus compliqué de répondre aux attentes des clients et même de les surpasser.
Dans d’un deuxième point, il y a le coût de la livraison. Alors répondre aux exigences en est une chose. Pouvoir contrôler ses coûts et faire en sorte que finalement ça n’impacte pas trop fortement les marges, c’en est une autre.
Et aujourd’hui, on a des pénuries de ressources, on voit qu’au niveau des chauffeurs ça devient très compliqué. On a des coûts de gasoil et autres qui vont venir impacter fortement justement chaque aspect de la livraison.
Et donc le deuxième enjeu, c’est tout simple, c’est de savoir - ou d’être en capacité plutôt - de limiter le coût pour chaque livraison et d’être le plus efficient possible.
Et puis le point numéro trois, qui n’est pas le moins important, c’est de limiter au maximum l’empreinte carbone. Alors tout d’abord parce que c’est maintenant devenu un sujet de société - moi-même en tant que consommateur, je souhaite apporter ma pierre à l’édifice - mais aussi parce qu’on a de plus en plus de régulations autour de l’écologie et de politiques au sein des entreprises.
Et donc la complexité, c’est justement comment répondre à cette équation-là qui devient de plus en plus complexe et difficile et comment on joue sur ces trois leviers pour finalement se différencier.
[LDV] Vous disiez que ces enjeux étaient identifiables assez simplement, ça paraît évident quand vous le dites comme ça, mais parallèlement beaucoup d’entreprises essayent de résoudre ces problématiques. Certaines y arrivent, d’autres non. Comment on l’explique et puis comment on fait pour accompagner celles qui n’y arrivent pas ?
Alors il faudrait peut-être un petit peu plus que quelques minutes parce que c’est un sujet très intéressant, très complexe, mais c’est pour moi en tout cas ce qui va pouvoir aider une entreprise à faire la différence.
Quand on observe, quand on analyse les entreprises qui finalement ont réussi à se différencier sur le marché, on va se rendre compte qu’elles ont toutes réussi à changer, entre guillemets, de paradigme.
Aujourd’hui, dans la plupart des projets sur lesquels nous travaillons, l’idée de départ c’est de dire : « Je souhaite tout simplement uniquement répond à ma promesse pour le moins cher possible, donc on va essayer de travailler plutôt sur les coûts. » Alors que finalement la vision c’est plutôt de se dire une entreprise cherche à faire du profit, pas à réduire les coûts.
Et pour faire du profit, on a deux manières. Soit on génère plus de revenus - ça c’est plutôt la mission du département commercial - soit on limite les coûts. Ça c’est plutôt la mission du département finance.
Le département transport est entre les deux. Et finalement ce qu’il fait aujourd’hui c’est uniquement répondre à la promesse de livraison pour le moins cher possible. Et donc il est un petit peu, on va dire, exclut des discussions qui vont venir porter une pierre à l’édifice pour pouvoir optimiser et générer plus de revenus ou réduire les coûts.
Donc l’objectif et la nécessité c’est de pouvoir arrêter de travailler en silo et de pouvoir travailler de concert entre tous les départements, en se disant à partir de simulations, à partir de données, à partir de l’apport de la technologie, quel serait l’impact de telle ou de telle décision ? Si demain je décide de passer d’une livraison à 48 heures à une livraison à 24 heures, quel va-t-être l’impact ? Je vais peut-être augmenter mes coûts parce que ça devient un petit peu plus complexe, mais je vais peut-être récupérer un certain nombre de clients.
« Si demain je décide de passer d’une livraison à 48 heures à une livraison à 24 heures, quel va-t-être l’impact ? Je vais peut-être augmenter mes coûts parce que ça devient un petit peu plus complexe, mais je vais peut-être récupérer un certain nombre de clients. »
Et donc l’objectif c’est de pouvoir justement avoir cette vision un petit peu stratégique pour prendre des décisions où à la fin on va peut-être augmenter un petit peu les coûts de transport, mais on va générer beaucoup plus de revenus, et on va peut-être pouvoir avoir des clients qui n’étaient pas en mesure de commander chez nous pour certaines raisons.
[LDV] Est-ce que les entreprises ont conscience de cette nécessité d’avoir une approche transversale et non plus en silo ? Est-ce que ça s 'est intégré culturellement dans les entreprises aujourd’hui ?
[MZ] Pour certaines d’entre elles oui, pour d’autres non.
Le sujet c’est plutôt de se dire, même pour celles qui ont intégré cela, est-ce qu’elles sont à capacité de le faire d’un point de vue technologique aujourd’hui ? D’un point de vue modèle de travail ? Et de collaboration également ?
Et c’est là tout l’enjeu de l’apport de la technologie. La vision de Descartes c’est un peu de dire, ce qu’il faut faire aujourd’hui c’est essayer de réunir les acteurs de la chaîne logistique - que ce soit des collaborateurs, donc la partie humaine, ou que ce soit les technologies - pour faire en sorte que la prise de décision n’en soit que meilleur.
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La technologie, elle, n’est pas là pour remplacer l’humain aujourd’hui. Elle est là pour aider l’humain à prendre une meilleure décision et donc ça, c’est quelque chose de compliqué mais de réalisable et c’est justement ce qui fait que le sujet est aujourd’hui d'autant plus passionnant.
[LDV] Si on doit résumer, c’est compliqué mais si on doit le faire, quels sont selon vous les leviers principaux de la création de valeur au sein des opérations de transports et notamment du dernier kilomètre. Si on doit retenir quatre éléments clés, ce sera lesquels ?
[MZ] Le premier élément qui est un petit peu oublié des discussions, c’est la vision stratégique.
Pourquoi ? Parce que de ces analyses-là vont découler des décisions qui vont finalement impacter les opérations sur le long terme. Je vous donne quelques exemples.
Toute entreprise doit normalement pouvoir, via les données historiques, via un certain nombre de projections, avoir la capacité de faire une analyse et d’en ressortir des décisions type : Quelle typologie de véhicule allons-nous utiliser pour nos livraisons ?
Est-ce que c’est plutôt des vans ? Est-ce que c’est plutôt de gros camions ? Est-ce qu’il est mieux d’acheter ces véhicules-là, donc d’avoir une flotte interne ? Est-ce qu’il vaut mieux sous-traiter cette partie-là ?
Et donc on va avoir tout un tas de décisions qui doivent être prises via les données, parce qu’il va y avoir un impact sur le long terme.
Vous achetez aujourd’hui un van ou une flotte de 50 vans, vous allez devoir avoir cette contrainte maintenant pour vos livraisons sur les 5, 6, 7, 8 prochaines années. Et donc c’est très important.
Un autre aspect, et c’est pour rebondir un peu avec le côté profit, quel serait l’impact par exemple de passer d’une livraison sur 24 heures à une livraison sur un créneau de livraison de deux heures. L’impact, il y en a un au niveau des coûts, mais potentiellement il y en aura un au niveau des clients.
Et donc tout l’objectif, c’est d’avoir cette vision-là pour pouvoir se dire : « Quelle option de service allons nous offrir à la livraison ? »
Donc ça c’est le premier point pour moi potentiellement plus important.
Le deuxième c’est tout simplement l’optimisation, on va dire quotidienne opérationnelle, donc là vous avez vos commandes que vous devez livrer le jour même, le lendemain, dans la semaine.
Et donc l’objectif c’est de se dire, on a fait une promesse au client de lui livrer sur tel créneau, via encore une fois l’aide de la technologie, et le plus rapidement possible. Je suis en capacité de créer un plan qui va être le plus efficient. L’objectif étant le bon produit, au bon endroit, au bon moment.
Et donc ça, c’est un aspect très important parce qu’il faut absolument que la technologie soit en mesure de prendre en compte un certain nombre de contraintes. Le lieu de livraison, la typologie de produits, la typologie de camions, ça peut être une zone de faible émission par exemple, ça peut être un produit qui nécessite un compartiment surgelé. Donc comment on fait pour aider le planificateur à prendre la meilleure décision ?
« Il faut absolument que la technologie soit en mesure de prendre en compte un certain nombre de contraintes. »
Ensuite, une fois qu’on a fait le plan le plus efficient, l’exécution des routes et surtout l’assistance chauffeur. C’est un point qui est souvent éludé dès quand on parle de l’exécution des routes. On parle souvent de tracking mais ce n’est pas que du tracking, ce n’est pas que de l’analyse, même si c’est très important.
Ce qu’il faut se dire, c’est que l’entreprise investit un certain nombre de ressources, que ce soit humaine ou technologique, pour produire un plan qui se doit d’être le plus efficient. Maintenant, comment j’aide justement mes prestataires de service ou mes propres chauffeurs à faire en sorte de suivre ce plan, pour que la réalité, finalement, s'approche le plus du planifié.
Et donc, c’est un point très important d’être en capacité d’offrir aux chauffeurs un certain nombre d’informations ou d’aide. Aujourd’hui, on a beaucoup de chauffeurs qui vont utiliser des applications type Google ou Waze mais qui ne sont pas faites pour les véhicules poids lourds et donc qui ne vont pas prendre en compte les contraintes, par exemple, sur un pont en particulier.
La capacité pour le chauffeur de pouvoir peut-être gérer les exceptions - une exception peut-être un produit endommagé qui ne serait pas livré, une quantité différente, un client qui ne soit pas présent - et de pouvoir remonter ces informations-là. Donc ça, c’est un point très important.
Et puis le dernier des points - vous en vouliez un quatrième - mais qui n’est pas en bout de chaîne, c’est la relation avec le client. C’est comment je fais en sorte dès la commande, jusqu’à la livraison finale, d’avoir un contact avec le client, de lui offrir un maximum de visibilité sur sa livraison, de lui offrir la capacité potentiellement de demander une relivraison à une date ultérieure sans que cela soit particulièrement poussif point de vue expérience client, et comment je fais en sorte également de récupérer un feedback très rapidement sur la qualité à la fois de la livraison et à la fois du service du chauffeur.
Ça c’est très important parce qu’on se rend compte de plus en plus qu’on a toujours des aléas, il y a toujours des exceptions qui vont arriver, il y a toujours des problématiques dans les livraisons. Le point le plus important c’est comment on va gérer ces problématiques-là.
« On a toujours des aléas, il y a toujours des exceptions qui vont arriver, il y a toujours des problématiques dans les livraisons. Le point le plus important c’est comment on va gérer ces problématiques-là. »
Et on se rend compte que plus on est proactif, plus on est rapide dans notre capacité à contacter le client, à essayer de trouver une solution avec lui, plus le taux de recommande finalement va augmenter.
Et donc voilà quatre piliers de création de valeur sur lesquels il faut travailler. Toutes les entreprises ne seront pas au même niveau de maturité sur ces quatre piliers-là, donc la première des choses c’est ce qu’on fait justement, de faire un diagnostic, d’essayer de comprendre quels sont les objectifs de l’entreprise et où en est l’objectif d’un point de vue maturité sur ces quatre piliers-là.
[LDV] Mais très bien, merci beaucoup Mounir, la main est tendue, on sait que Descartes peut vous aider, voilà.
[MZ] Merci à vous.
[LDV] Au revoir.
[MZ] Au revoir !